Il y a quelques semaines, une amie a publié une capture d’écran dans sa story. L’image montrait la section de profil sur Instagram, où l’on pouvait voir ses photos et son contenu. Le grand hic, c’est que ce profil portait un autre nom, car il ne lui appartenait pas. Dans sa story, elle nous avertissait qu’il s’agissait d’un faux profil et nous demandait de le signaler pour qu’il soit supprimé.
Ce qui était surprenant, c'est que ce profil avait déjà plus d'abonnés que l'original, tout en publiant exactement le même contenu, disposé de la même manière. Qui pouvait bien être derrière ce compte, décidé à usurper l’identité de quelqu’un d’autre ?
Pendant que je signalais le profil, je n'arrêtais pas de me poser des questions... La tragédie avait déjà eu lieu, et nous prenions toutes les mesures de sécurité possibles, mais il ne me restait que la curiosité. Cela renforçait ma conviction que la photographie n’offre aucune garantie. N'importe qui pourrait prendre l’image de l’autre et “l'endosser” pour se faire passer pour n’importe qui. Je constatais la reproductibilité technique dans toute sa splendeur…
Les photos n'étaient pas manipulées, certaines avaient une basse résolution et d’autres semblaient prises par un professionnel. Il y avait des stories et des reels capturés par un téléphone, des publications étiquetées. J’avais l’impression que si j’étais tombé sur ce profil en premier, sans connaître l’original, j'aurais juré que c'était mon amie. D'autant plus que tout le contenu était identique et publié presque aux mêmes dates.
Tout semblait très organique, et les photos avaient l'air “naturelles”, d’où le piège parfait... Personne ne falsifie un billet de 3 dollars, car le meilleur mensonge est celui qui se rapproche le plus de la vérité, et notre meilleur mensonge se trouve dans la photographie : accepter l'image comme unique, statique et fidèle à la réalité.
La foi avec laquelle nous nous rapportons à la photographie, la confiance aveugle que nous plaçons en elle, est ce que la tragédie de mon amie m'a révélé à nouveau. La photo est là, comme une possibilité. Elle n’est ni héroïne ni méchante, elle est simplement là. Soudain, quelqu'un d'autre l'utilise aussi, et avec elle, transgresse. C'est là tout le dilemme.
Finalement, Instagram a décidé de fermer une autre compte de son univers. En se basant sur ses propres règles de logique et de mathématiques, il a déterminé que le compte de mon amie était le faux, car l'autre avait plus d'interactions.
Tout un paradigme.